Aujourd’hui, ce pays bénéficie d’une reprise économique très nette après des dizaines d’années de crises socio-politiques. Ces dernières ont fini par affecter sa région.
L’Afrique, mon retour aux sources
Je suis née de parents d’origine italienne aux pieds de la gigantesque montagne du Kilimandjaro en Tanzanie. Depuis mon départ à 15 ans de ces vastes régions sauvages, je n’y étais jamais retournée. Il a fallu de belles rencontres et un vaste projet pour que j’y revienne lors d’un voyage professionnel à la fin de l’année 2019. Quand j’ai atterri en Côte d’Ivoire une émotion intense m’a envahie. J’étais chez moi. J’étais en Afrique. Là toutes les couleurs et les parfums connus me sont revenus. Ma mémoire les avait conservés et les a libérés à cette occasion. Surgissaient des images fortes telles que ces trois jours de train que je devais faire pour me rendre à l’internat anglais où je recevais mon éducation. Là-bas, pour eux, je n’étais ni anglaise, ni française, ni vraiment italienne mais africaine.
Une mission africaine avec le FIDA, agence spécialisée des Nations Unies
Le Fonds International de Développement Agricole (FIDA) est arrivé dans ma vie par des connaissances. L’une d’entre elles travaillait à l’époque au siège du FIDA à Rome, une agence spécialisée des Nations Unies. Elle recherchait une agence de branding et packaging pour aider les petits agriculteurs indépendants de l’Afrique de l’Ouest, afin d’ajouter de la valeur à leurs produits. J’ai alors découvert les diverses activités de ce fonds qui est présent là où la pauvreté et la faim sont les plus aigües, c’est à dire, dans les régions les plus reculées des pays en développement et en situation de fragilité. Dans la sous–région d’Afrique de l’Ouest et du centre, le FIDA opère dans 23 pays. Dont la Côte d’Ivoire, le Tchad, le Sénégal, mais aussi le Niger, le Burkina Faso, etc. Ces programmes financés par le FIDA incluent activement les populations vulnérables dans ces pays telles que les femmes et les jeunes.
Projet d’appui au développement agricole et à la commercialisation (PROPACOM) appuyé par le FIDA en Côte d’Ivoire
Par le biais du FIDA , nous avons démarré le projet par la Côte d’Ivoire en décembre Ouest. L’équipe du projet Propacom nous a aidé tout le long de ce séjour passionnant. Nous avons rencontré de petits exploitants agricoles d’attiéké (semoule de manioc) qui ont besoin de stockage, de conditionnement et de distribution pour leur produit. Localement, leur agriculture est essentiellement tournée vers l’autoconsommation et l’économie de subsistance. Cette région de la Côte d’Ivoire est confrontée à de grandes difficultés dans la chaîne agricole : de la production à la commercialisation. Des accès limités aux technologies appropriées pour une production efficace ainsi que des accès limités aux marchés et aux circuits de distribution (surtout au moment de la saison des pluies) complexifient le développement régional. Nous nous en rendons compte lors de nos déplacements en voiture. Il n’est pas rare d’effectuer des trajets de 10 heures ; alternant autoroute et piste, avant de rejoindre une des petites fermes d’attiéké. Ces exploitants indépendants sont souvent volontaires mais isolés et ne cachent pas leurs besoins urgents d’aide.
Des enjeux à la hauteur de l’ambition africaine
Le projet comprend cinq autres régions ivoiriennes. Riches en matières premières, elles comptent sur une transformation valorisante en produits finis. L’objectif est l’augmentation des revenus des petits producteurs locaux. A terme les populations vulnérables telles que les femmes, les jeunes et les personnes souffrant de malnutrition vont bénéficier de cette transformation. Après la Côte d’Ivoire, c’est toute l’Afrique de l’Ouest qui sera concernée. C’est dire l’ambition du programme proposé pour aider les petits producteurs appuyés par le FIDA. Ce premier voyage nous a donné la mesure de l’ampleur de la tâche à accomplir. Il nous a aussi permis de valider nos convictions profondes ; la nécessité absolue d’un transfert de connaissances via des appuis de la chambre de commerce, du conseil aux entreprises, des fournisseurs et des designers locaux pour réussir cette entreprise. Notre cahier des charges suite à ce premier voyage ; focaliser le projet sur des enjeux d’éco conception (forme, matières, graphisme) et de contenants (packaging), basé sur une agriculture aussi exigeante et naturelle que le bio. Enfin, les fonds provenant du FIDA et du gouvernement Ivoirien sont attendus pour lancer conjointement les initiatives sur les pays de l’Afrique de l’ouest. Plusieurs filières agricoles telles que la mangue avec le partenariat à venir avec le PADFA ; et surtout la mise en place d’une force de vente et la promotion de produits locaux sous la marque « Terre d’Ivoire ».
Aéroports, routes, barrages et … branding et packaging !
En Côte d’Ivoire, la nature est généreuse. Les ressources naturelles sont nombreuses grâce à une pluie abondante. Cependant, les productions d’attiéké sont parfois mises à mal. Entre l’humidité, les insectes, le manque de stockage et une distribution aléatoire, elles ne bénéficient pas toujours du meilleur développement possible. Plus habitué à la production et la productivité des petits agriculteurs qu’à la conception de marques et la fabrication d’emballages, le FIDA nous considère comme le partenaire qui va transmettre son savoir-faire en créant toute une filière d’éco conception hygiénique. Incluant les transports et le tout, à un coût abordable. Transmettre notre savoir-faire et nos compétences passent par la création future d’une agence Team Créatif à Abidjan. C’est devenu une évidence. Cette implantation facilitera le recrutement de graphistes locaux. Mais également l’accompagnement auprès des imprimeurs quasi-inexistants en Côte d’Ivoire pour la mise en place de la filière.
Une bannière fédératrice, Terre d’Africa
Fort de notre expérience avec l’eau de coco Obrigado au Brésil ; le lait et les jus de fruits Juhayna en Égypte ; la marque équitable Alter Eco en France, etc. ; nous avons présenté un concept fédérateur intitulé Terre d’Afrique déclinable dans tous les pays que nous adressons dans ce projet. Autre grand chantier : le travail des emballages durables que nous allons imaginer pour qu’ils soient le plus recyclables et le plus hygiéniques possibles. A terme, nous proposons à chaque cultivateur de valoriser la chaîne de valeur de sa filière en vendant les produits finis et emballés au juste prix. Cependant, nous devons encore résoudre des problématiques telles que le dépôt de marque, le stockage des emballages, mais aussi l’apposition de la date limite sur les packs.
Coïncidence ? Destin ? Ce projet est gigantesque et semé d’embuches. Alors pourquoi se battre aux côtés des petits producteurs locaux appuyés par le FIDA ? Mon attachement à cette terre africaine explique en partie ma passion pour ce programme. Les conditions de vie actuelles d’une majorité des africains sont aussi une motivation pour moi. Avec le changement climatique, la situation a empiré. Des peuples entiers vont disparaître faute de pluie et à cause des conflits militaires, générant des famines aiguës et récurrentes. Le rapport mondial de la FAO ; fait état de près de 72 millions de personnes vivant en Afrique, victimes des guerres et des évènements climatiques. Les pays africains de la corne de l’Afrique sont les plus touchés selon le rapport de la FAO. Avec leur programme WFP (World Food Programme), les Nations Unis se battent tous les jours pour soutenir les pays dans leur combat contre la famine et les guerres ; en témoigne, leur prix Nobel de la Paix décerné en Octobre 2020. Ce projet résonne encore plus pour aider à surmonter les impacts du COVID via le digital.
Confrontée à cette réalité, j’ai pris conscience qu’il était temps pour moi de m’investir en Afrique. Où la raison d’être de notre groupe « Designing a beautiful tomorrow » prendrait tout son sens.